dimanche 25 novembre 2007

Evolution des determinant des remises en Turquie

Dans ce papier de 2005, Aydas, Neypati et Metin-Ozcan se proposent d’étudier les déterminants macro-économiques des remises des travailleurs. Leur étude porte plus particulièrement sur le cas de la Turquie. Ce cas est intéressant pour plusieurs raisons. Premièrement, la Turquie possède des statistiques sur le montant des remittances depuis 1964, alors que pour la plupart des pays, ces données n’existent que depuis le milieu des années 70. Deuxièmement, la Turquie ayant eu une politique active d’envoi à l’étranger de travailleurs, il existe des données précises sur les contingents envoyés à l’étranger depuis au moins 1961. Troisièmement, les autorités Turques ont pris conscience très tôt de l’opportunité que pouvait représenter ces flots de devises, et ont essayées divers politiques pour les favoriser et les canaliser. Il est donc intéressant de voir si l’on peut isoler l’effet de ces politiques dans les données.

A partir du début des années 60, la Turquie a menée une politique de développement planifiée. Basée sur une industrialisation rapide, de grandes unités technologiquement avancée et très intensive en capital, elle a crée peu d’emploi. En parallèle la productivité du secteur agricole traditionnel a crue, diminuant l’utilisation de main d’œuvre. Le chômage dissimulée dans le secteur traditionnel a donc commence à apparaitre au grand jour. D’autre part cette politique d’industrialisation a rendu la Turquie dépendante de ses importations d’intrants et de technologie, et donc demandeuse de devises. La politique logique pour faire face à ces problèmes était d’exporter le plus possible de main d’œuvre en essayant de maximiser le flot des remises de ces migrants. Différentes politiques ont été mises en œuvre pour maximiser les remises : des taux de changes préférentiels, des taux d’intérêts élevés pour les comptes en devises… Les autorités ont aussi essaye de canaliser ces remises dans des activités productives et créatrice d’emploi, notamment en proposant des prêts en lire turque pour l’investissement garanties par des comptes en devises ouvert par les migrants.

Une étude économétrique est conduite avec une série de variables explicatives macro-économiques : le stock de travailleurs a l’étranger, le PIB pc Turque et un indice du PIB pc des pays de destination des migrants, la croissance du PIB Turque; Des variables monétaires comme le différentiel de taux d’intérêt, la prime au marche noir, la surévaluation réel, l’inflation domestique. L’analyse est conduite sur deux périodes : 1965-1993 et 1979-1993. Durant la première période, le niveau du PIB Turque est significatif et influe négativement sur le montant des remises, comme la prime au marché noir, tandis que la surévaluation influe positivement. Le fait que ces variables soient significative, et que le différentiel de taux d’intérêt ne le soit pas, indique que sur cette période les remises ont pour but de lisser la consommation et ne sont pas envoyées a des fins d’investissement. Néanmoins, le fait que la prime au marché noir soit significative et négative révèle à mon sens une faille dans l’étude: les auteurs analysent ce coefficient comme signifiant que le contrôle des taux de changes décourage les remises. Or, s’il est plus profitable de passer par le marché noir, il est possible qu’une partie des remises qui passaient par les canaux officiels se soient mise à transiter par des canaux non-officiels, qui par définition ne sont pas pris en compte dans les données. Le montant des remises pourrait donc être globalement inchangé, seules les modalités de transfert variant. Sur la seconde période, la surévaluation n’est plus significative, en revanche le montant des remises est positivement affecté par le PIB des pays de résidence des migrants, par le différentiel de taux d’intérêt en faveur de la Turquie, et négativement par la dummy représentant les années de gouvernement par l’armée et l’inflation. Ces résultats indiquent qu’après 1979, le montant des remises est influencé par les possibilités d’investissement, ce qui rend ces flux sensibles a la stabilité monétaire et politique.

Mon hypothèse pour expliquer le changement de nature des remises : les migrants étant établis depuis longtemps dans leur pays de résidences, nombre d’entre eux ayant pu faire venir leurs familles, ils n’ont plus à garantir le niveau de consommation de proches. Les remises changent donc de but, et deviennent un moyen de préparer un éventuel retour en investissement dans l’immobilier, en épargnant pour la retraite profitant des taux d’intérêts favorables pour les comptes en devise, ou faisant un investissement productif afin de se garantir un revenu une fois de retour. Cette étude démontre l’importance de la stabilité politique et économique, ainsi que d’une politique de change transparente pour attirer les remises a but productifs, plus a même de contribuer a une croissance de long terme que les remises destinées a lisser la consommation.

Et vous, qu’en pensez vous ?

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